Contrairement à ce que la culture populaire laisse croire, les meutes de loups ne sont pas dominées par un mâle alpha. Eh non!
On attribue généralement à l’Allemand Rudolf Schenkel la première publication d’importance sur la sociologie des loups. En 1947, la revue Behaviour publie son article « Ausdrucks-Studien an Wölfen : Gefangenschafts-Beobachtungen » (Études d'expression dans les observations de la captivité des loups) où l’auteur introduit la dynamique de dominance et le terme si populaire d’animal alpha. D’ailleurs, bien qu’on mentionne souvent « mâle alpha », Schenkel parlait plutôt d’un couple alpha : ce n’est donc pas propre au genre masculin...
Autre nuance importante : le zoologiste Schenkel présentait ses observations sur une meute de loups captive! C’est pourquoi en 1999, lorsque David Mech publie son livre « The Wolf : The Ecology and Behavior of an Endangered Species », l’édition rencontre un véritable succès. Après avoir observé des meutes de loups en liberté pendant plus de 13 étés à l’île d’Ellesmere, située aux Territoires du Nord-Ouest, Mech compare plutôt la meute à… une famille!
« J’ai conclu qu’une meute typique est une famille dans laquelle les parents adultes dirigent les activités du groupe selon un système de partage des tâches, où la femelle prédomine surtout dans les activités de parentage et de défense des petits et le mâle, surtout au cours des activités de quête de nourriture et d’accumulation de réserves et au cours des déplacements que supposent ces activités. »
Extrait de Alpha status, dominance, and division of labor in wolf packs (USGS Northern Prairie Wildlife Research Center, University of Nebraska, 1999)
Bien que les études aient démantelé le mythe du mâle alpha, pourquoi évoque-t-on cette idée encore aujourd’hui? Autrement dit, comment se fait-il que nous associions encore aujourd’hui le leadership et le pouvoir à ce mythe?
La « direction selon le principe alpha » a été longtemps à la mode et a inspiré de nombreux coach, consultant, psychologue et dirigeant d’entreprise. Encore aujourd’hui, certains coachs amènent les participants à apprendre le « comportement de dirigeant du loup ». Et pas seulement au sens figuré!
Certains séminaires vous proposent d’entrer dans un enclos où il est possible d’observer comment le loup alpha domine sa meute... Ce qui est complètement absurde maintenant que nous savons que les loups en enclos se comportent de manière atypique. Plus précisément, en captivité, les loups vivent comme des détenus en prison! À l’intérieur d’un enclos, le plus agressif et dominant du groupe impose une hiérarchie coercitive qui brime tout le monde.
Pour qu’un groupe fonctionne bien, tous ses membres doivent travailler ensemble. Cela est valable autant pour une meute de loups que pour une famille ou un groupe d’êtres humains. Dans une meute prospère, les intérêts de la communauté passent avant les intérêts individuels.
La recette de la prospérité et de la pérennité d’une meute forte contient quatre ingrédients clés que nous avons identifiés dans la littérature :
Canaliser afin de se concentrer sur l’essentiel
Contribuer ensemble au bien-être de tous
Communiquer efficacement et constamment
Mobiliser les forces des membres de la meute vers un objectif commun
Nous aborderons ces ingrédients clés plus précisément dans les prochains articles de blogue.
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Pour poursuivre la lecture :
L. David Mech et al. (1999). Alpha Status, Dominance, and Division of Labor in Wolf Packs. Canadian Journal of Zoology
Nic Ulmi - Le Temps (2016). Les meutes de loups n’ont pas de chef, Le Devoir, (en ligne) https://www.ledevoir.com/societe/477728/idiotismes-animaliers-y-a-t-il-un-male-alpha-dans-la-meute-de-loups
Elli H Radinger (2018). La Sagesse des loups : comment ils pensent, s'organisent, se soucient les uns des autres... Édition Guy Trédaniel